Si les
pèlerins devaient attendre longtemps leur tour pour se confesser
à Padre Pio, du moins pouvaient-ils facilement participer chaque
matin à la Messe qu'il célébrait de bonne heure
à la chapelle du couvent.
Ses messes duraient longtemps mais personne ne s'apercevait du temps
qui passait. Il arriva pourtant que ses supérieurs interviennent
pour qu'il ne les prolonge pas au risque d'épuiser la
piété des assistants, et aussi pour qu'il soit ensuite
à la disposition des pénitents qui attendaient pour se
confesser. La durée moyenne d'une messe était d'une heure
et demi. Quand arrivait le moment culminant, celui de la
consécration, il était difficile de distinguer la victime
de celui qui l'offrait, ils n'étaient plus qu'un dans le
même Esprit. Le regard, les paroles du célébrant
étaient comme transfigurés par Celui avec lequel il
entrait en dialogue. Il interrompait les prières par de longs
moments d'adoration.
Faim
et soif du Christ
Bien avant que les fidèles le voient monter à l'autel, le
Padre se préparait à la sacristie. Pendant qu'un long
silence entourait encore les personnes et les choses à
l'intérieur comme à l'extérieur du couvent, il se
perdait en Dieu pour préparer ce moment souhaité,
désiré, aimé, qui lui donnait l'occasion de s'unir
à son Bien-Aimé. "J'ai
tellement faim et soif de le recevoir, confia-t-il un jour, qu'il m'arrive parfois d'avoir peur d'en
manquer au point de mourir de faim."
Uni
à la croix
Cette faim et cette soif n'étaient pas l'exaltation d'un
instant. Au fil de son existence, elles devinrent toujours plus
grandes, toujours plus intenses. La communion eucharistique a
transformé Padre Pio, Jésus le prenant aux mots de sa
prière d'ordination : "Que je
sois par toi prêtre saint, victime parfaite."
Certes, sur ce chemin, les obstacles ne manquèrent pas et le
démon s'opposa par tous les moyens à cette aventure. Mais
les épreuves elles-mêmes furent vécues et
assumées dans le mystère d'amour de Jésus sur la
croix.
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Il
fut ainsi donné à Padre Pio de participer pleinement
au sacrifice actualisé quotidiennement à l'autel.
Un jour, un de ses confrères lui
demanda :
- Père, comment
êtes-vous à l'autel ?
- Comme le Christ sur la
Croix.
- Tout le temps de la
messe vous êtes suspendu à la croix ?
- Oui, et comment veux-tu
que j'y sois ?
- Alors, à la
Sainte messe, vous mourez ?
- Mystiquement à
la Sainte Communion.
- Par douleur ou par
amour, Père ?
- Plus par amour.
Une
nécessité de la vie chrétienne
Cela qui était sa vie, Padre Pio essayait d'en communiquer
l'envie, le
besoin même, à tout Chrétien. Pour lui, sans
l'Eucharistie, le Chrétien
était en danger. Il criait son indignation de
l'indifférence de
certains :
"Je ne peux pas
m'imaginer que l'on puisse vivre de la vraie vie sans
la nourriture des forts. Le moyen le plus sûr pour
échapper à la
corruption est de nous fortifier avec l'Eucharistie. Celui qui vit sans se rassasier de la
chair immaculée de l'Agneau
Divin, ne pourra ni éviter le péché, ni progresser
dans la voie de la
perfection."
Jusqu'à la fin, malgré son état d'extrême
faiblesse, Padre Pio tint à
célébrer la Messe chaque jour. Un frère l'aidait
à monter à l'autel et
le soutenait pendant la célébration. Le dimanche 22
septembre 1968, une
messe solennelle fut célébrée pour le
cinquantenaire de sa
stigmatisation. Au terme, le Padre s'effondra de fatigue.
La nuit suivante, Celui qui l'avait marqué des signes de sa
Passion l'introduisait dans sa Gloire.
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