« L’Eucharistie était le
centre d’attraction vers lequel convergeaient tous les moments de la
journée de Padre Pio. Chaque heure du jour était une
préparation ininterrompue et une action de grâce
continuelle à Jésus dans le Saint Sacrement. »
(Père Tarcisio, "La messe de Padre Pio")
Un autre frère capucin a témoigné avoir dû,
à plusieurs reprises, "arrêter" Padre Pio en pleine nuit,
alors qu'il se levait déjà et s'en allait à
l'église : la faim du Corps, la soif du Sang du Christ le
tenaillaient au point qu'il ne pouvait attendre plus longtemps... ni
l'heure, ni la fatigue, ni un état de santé bien souvent
délabré, rien ne semblait être un obstacle valable.
Padre Pio l'écrivit (et le dit) à de très
nombreuses reprises ; voici, par exemple, ce qu'il décrivait
à son Père spirituel, Padre Benedetto, le 29 mars 1911 :
« Mon cœur se sent
comme attiré par une force supérieure avant de s’unir
à lui le matin dans le sacrement de l’Eucharistie. J’en ai une
telle faim et une telle soif, avant de le recevoir, que peu s’en faut
que je ne meure d’inanition. Et c’est justement parce que je ne peux
pas ne pas m’unir à lui que je suis obligé d’aller me
nourrir de sa chair, parfois même malgré ma fièvre.
»
Padre Pio est alors à Pietrelcina, dans sa
famille, depuis une année, pour des raisons de santé, et
il a été ordonné prêtre quelques mois
auparavant le 10 août 1910.
Il connaît à cette époque une nuit mystique,
état spirituel dans lequel il ne sent souvent plus rien de Dieu.
Le dernière phrase de la citation prend alors toute sa force :
sa faim de l'Eucharistie est d'autant plus forte que Jésus lui
semble absent ; il désire le Corps du Christ ; il le veut ainsi,
car il en a fait l'expérience, et surtout parce que la Foi de
l'Église l'affirme : Jésus est réellement
présent dans le Sacrement de l'autel. Il y a donc toujours un
lieu et un temps où le trouver : la messe.
Quand, finalement, Padre Pio n'était pas arrêté
(par sa santé, par un frère bienveillant pour Padre Pio,
et fatigué pour lui-même), il commençait une longue
préparation à la célébration de la messe. On
pourrait ici reprendre la remarque du Curé d'Ars,
répondant à quelqu'un
qui s'étonnait de l'heure qu'il passsait en prière devant
le
Saint-Sacrement avant de célébrer : «
Je vais toucher le Bon Dieu et je vais lui commander, et vous ne voulez
pas que je me prépare !
»
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Voilà
qui nous interroge sur notre propre faim du Corps du Christ, sur notre
soif de son Sang, sur ces autres réalités que nous
désirons plus que le
Seigneur.
Un autre texte de Padre Pio peut
être lu ici.
Padre Pio rapporte ici des paroles de Jésus qui lui est apparu
dans un vision mentale :
«
Ils me laissent seul de jour comme de nuit dans les églises. Ils
ne
se soucient plus du sacrement de l’autel ; on ne parle plus de ce
sacrement d’amour ; et même ceux qui en parlent, hélas,
avec quelle
indifférence, avec quelle froideur ils le font !
Mon
Cœur est oublié. Personne n’a plus souci de mon amour. Je
suis
toujours dans la tristesse. Pour beaucoup, ma maison est devenue un
théâtre ; il en est ainsi de mes ministres
eux-mêmes, que j’ai toujours
regardé avec prédilection, que j’ai aimés comme la
pupille de l’œil.
Eux, ils devraient réconforter mon cœur plein d’amertume, ils
devraient
m’aider à sauver des âmes. Or, qui le croirait, je
reçois de leur part
beaucoup d’ingratitude. Je vois, mon fils, beaucoup de ceux-là
qui…
(ici, il se tut, la gorge serrée, et il pleura en silence) me
trahissent avec des airs hypocrites par des communions
sacrilèges,
foulant aux pieds les lumières et les forces que je ne cesse de
leur
donner. »
(Lettre au Père Agostino, 12 mars
1913)
Ce
texte nous
interroge sur ces petits détours que nous ne faisons pas pour
passer, ne serait-ce qu'un moment dans l'église devant laquelle
on passe. N'est-ce pas là une préparation lointaine
à la messe ? N'est-ce pas là un inidice de notre faim (ou
non-faim) de l'Eucharistie, et un moyen de la raviver, de l'entretenir ?
Ce texte nous renvoie
aussi à une désinvolture que l'on rencontre parfois au
début de
certaines célébrations, où le bruit et les
distractions font que nous
n’attendons pas Jésus en vérité et dans le
recueillement : bruits dans
l’assemblée, distractions de notre esprit.
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