Padre Pio était souvent ému
jusqu’aux larmes en entendant ou en proclamant l’Ecriture Sainte au
cours de la messe. Un jour qu’on lui en demandait la raison, il
déclara : « Les dons de Dieu n’ont donc pas de valeur
pour toi ! Cela est-il de peu d’intérêt que Dieu dialogue
avec ses créatures ? »
Dans la lecture et la
méditation de l’Ecriture, il y a un dialogue réel entre
Dieu et l’homme. Entendre la voix du Seigneur : quelle grâce,
quelle émotion !
Cette émotion, comme celle qui est vécue dans
l’expérience de la miséricorde, n’est pas un sentiment
occasionnel, un échauffement des sens, forcément ambigu.
Elle est un mouvement profond de l’âme qui naît d’une
familiarité avec la Parole de Dieu, en premier lieu l’Evangile.
Cette familiarité se construit et se vit dans la prière.
Dans ses lettres d’accompagnement spirituel, Padre Pio insiste beaucoup
sur cet aspect : la méditation de la vie de Jésus prime
sur toute autre méditation. Ainsi écrit-il à l’une
de ses filles spirituelles, Annita Rodote : « Je
désire de votre part une chose plus que toute autre : que votre
méditation ordinaire se porte autant que possible sur la vie, la
passion et la mort, sans oublier la résurrection et l’ascension
de notre Seigneur Jésus Christ. » (8 mars 1915)
Il va jusqu’à se faire le directeur de son directeur spirituel,
le Père Agostino, afin que ce point soit clair dans l’esprit de
ce dernier : « Ayez toujours le ferme propos, mon bon
Père, de répondre généreusement à
Jésus et de vous rendre digne de lui, c’est-à-dire
semblable à lui et orné des adorables perfections
révélées par l’Ecriture et l’Evangile. Mais pour
que cette imitation soit possible, il y faut une réflexion
quotidienne sur la vie de celui qui se propose comme modèle. De
cette réflexion naît l’estime de ses actes, et de cette
estime le désir et le réconfort de l’imitation. » (27 février 1918)
|
On pourrait presque dire que pour quelqu’un de
familier avec l’Ecriture (et quel chrétien ne devrait pas
l’être), l’oraison doit se concentrer en priorité sur les
mystères de Jésus, c’est-à-dire les
événements de sa vie qui révèlent une
dimension fondamentale de sa personne. Les "mystères de
Jésus" sont comme des points de concentration de la personne de
Jésus, de son existence.
Ces mystères sont toujours envisagés dans la
prière. A partir d’ici, on pourrait développer la
prière du rosaire chez Padre Pio : prière
évangélique (les mots viennent de l’Evangile) ;
méditation sur les mystères de la vie de Jésus et
de Marie, qui nous renvoient au mystère fondamental qu’est
Jésus ; prière qui permet de parcourir, dans le silence
du cœur et le temps de la prière, l’ensemble du chemin que nous
avons à parcourir peu à peu dans notre existence à
la suite de Jésus.
Le temps de la prière revêt alors une dimension salutaire,
quasi sacramentelle, ainsi que Jean-Paul II l’écrit dans sa
lettre apostolique sur le rosaire, en établissant un
parallèle entre le rosaire et l’Eucharistie : « Si
la liturgie, action du Christ et de l'Église, est l'action
salvifique par excellence, le Rosaire, en tant que méditation
sur le Christ avec Marie, est une contemplation salutaire. Nous plonger
en effet, de mystère en mystère, dans la vie du
Rédempteur, fait en sorte que ce que le Christ a
réalisé et ce que la liturgie actualise soient
profondément assimilés et modèlent notre
existence. » (Lettre apostolique sur
le Rosaire, 16 octobre 2002, n°13)
La Parole de Dieu (dans la messe, la Liturgie de la
Parole) est le pont entre rosaire et Eucharistie. L’Eucharistie et le
rosaire étant si importants, si fondamentaux dans la vie et
l’expérience de Padre Pio, comment la Parole de Dieu ne le
serait-elle pas également ? |