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Souffrance, paix et Esprit-Saint

par le Père Carré, tiré de « Chaque jour je commence » (Cerf, coll. Foi Vivante, 1993, pp.131-132)



(Dans un développement sur la folie chrétienne qui est confiance radicale et sur la nécessité de se livrer à l’Esprit Saint)

Il reste que si je fais confiance à l’Esprit, cet égarement me coûtera cher. Pierre n’a pas été jusqu’à traiter Jésus d’insensé, mais l’idée y est. Or, Jésus venait d’annoncer sa passion, sa mort, sa résurrection. Lorsque Paul parle de folie, il se réfère toujours à la croix du Christ. Voilà le point où la rationalité dont on nous rebat les oreilles, aujourd’hui plus que jamais, achoppe avec violence. Et voilà aussi le moyen de discerner, sans erreur d’interprétation, ce qui relève de l’Esprit et ce qui n’est pas de lui. L’Esprit nous configure au Christ. Il tient pour nous en réserve les strophes du Cantique au Soleil, il les fait même monter de temps à autre à nos lèvres, mais l’hymne s’interrompt – pour des années peut-être – chaque fois que consciemment nous nous dérobons devant le Séraphin qui visita François à l’Alverne.
On me dira que l’exemple que je vais citer est hors du commun, et qu’il est au surplus discutable (car on l’a utilisé pour des fins partisanes). Cependant, je ne puis pas ne pas nommer ici le Padre Pio, qui fait partie de mes intercesseurs. Je l’ai vu deux fois et, la seconde fois, après l’avoir assisté à l’autel, j’ai pratiquement passé avec lui toute une matinée. Il était entouré, gardé (le mot est plus exact), par des religieux à la mine patibulaire. Il vivait un long calvaire. Jamais personne ne m’a laissé une telle impression de force contenue, de bon sens, de joie teintée d’humour et de paix. Je n’attardais pas mon regard sur les stigmates de ses mains, que j’ai vus nettement. Il était habité par l’Esprit : aussi, sans paradoxe, était-ce plutôt à tous les disciples de Jésus que je pensais, y compris les plus ordinaires. Le lien entre la croix du Christ et la présence de l’Esprit était éclatant à San Giovanni Rotondo. C’est pourquoi j’évoquais tant de personnes que je connais, parmi les riches et parmi les pauvres, qui sont accablées dans leur corps et dans leur cœur. Ils ignorent encore qu’ils peuvent livrer ce dont ils souffrent au Saint-Esprit de Dieu. En donnant un sens à leur croix, l’Esprit ferait d’eux, déjà – comme du Padre Pio -, "les fils de la Résurrection".